t'as fini de me mater ? (anakin)

La routine, ça tue. Toujours les mêmes tâches à effectuer au taf : les légumes à déballer, les fruits à contrôler, les sommes à encaisser. Ça fait mal au dos, tout ça ; mais tu ne t'en plains pas, toi qui es bien content d'avoir un travail. Qui dit travail, dit fin de mois assurée. Le reste, tu complètes. De façon pas toujours très légale.
T'es en train de remettre du produit en rayon. Faudrait pas que ça se vide, après tout. Ce serait con si les ménagères ne pouvaient pas acheter leurs pommes aujourd'hui, et soient obligées d'aller ailleurs. Parce que ton magasin, tu le sais, c'est la qualité assurée. Vous trouverez pas mieux dans le coin, moins cher, peut-être, mais attention car ce sera moins bon. Alors il faut que tu fasses gaffe : les étals doivent toujours être remplis, et les fruits manipulés avec soin. T'aimes bien être primeur. C'est plutôt cool, comme métier, tu en vois de toutes les couleurs et tu repères les pigeons.
Pourquoi cette jeune femme t'adresse-t-elle un regard aussi noir ?
Tu l'ignores. Dans les deux sens du terme : tu sais vraiment pas ce que tu lui as fait de mal, tu fais tellement de mal de toute façon que tu t'en rappelles jamais. Et puis, tu t'efforces de rester indifférent. Tu fais comme si tu l'avais pas vue te regarder comme ça. Elle croit peut-être qu'elle va te filer les jetons ? Bah voyons. T'es un dur, Oz. Tu flanches pas comme ça.
Lester et toi, vous avez cambriolé une demeure, il y a quelques jours. Rien de bien important, vous avez simplement remué ciel et terre pour dénicher les objets de valeurs. Portables, ordinateurs, tablettes et bijoux principalement. Parmi le butin amassé, tu as récupéré une chaîne un peu vieillotte. Lester et toi, vous ignorez complètement si elle a une quelconque valeur marchande ; vous ne vous y connaissez guère en joaillerie. Sans doute le bijou a-t-il une valeur sentimentale certaine. Mais, avec sa petite croix en pierres, tu trouvais que cela t'allait bien, alors tu te l'es approprié. Le collier trône désormais à ton cou, bien visible car tu portes un haut assez décolleté pour qu'on puisse apercevoir tes premiers tatouages. Et bien sûr, comme un idiot, tu n'as pas du tout songé que c'était imprudent. Après tout, le propriétaire de l'appartement n'était pas de vos clients, il n'y avait donc aucun risque, n'est-ce-pas ?
Mais elle te fixe, encore et toujours, et là, tu commences à en avoir un peu marre. Alors tu tournes la tête et tu lui lances :
« Qu'est-ce qu'y a, j'ai fait tomber quelque chose ? »
T'essaies de te montrer le moins agressif que possible. T'es au boulot, y'a ton patron pas loin, et c'est lui qui payes. S'il est pas content, tu dégages. Tu reconnais au moins que t'es obligé de lui plaire pour être tranquille, même si t'aimes pas ça. Ah, qu'est-ce qu'on ferait pas pour un peu de blé.